Minerve

Par un dimanche de juillet un peu échaudé, j’ai souhaité – accompagnée de mon guide cathare préféré et de sa princesse ténébreuse – de me reconnecter à mes sensations de voyage bien aimées en allant explorer l’inconnu voisin. Je n’ai rien décidé, je me suis simplement laissée porter par le savoir du Grand Sage du terroir si prompt à me partager son pays. Et pour ma première escapade cathare, je me suis rendue à Minerve, à la frontière de l’Hérault et de l’Aude, ourlée de la Cesse et du Brian, surmontée de vignobles, creusée au cœur du Parc Naturel régional de Haut Languedoc.

Proche de certains sites préhistoriques, l’Histoire connue de la cité ne remonte pourtant qu’à l’Antiquité romaine puisque l’on trouve des traces d’occupations dès le IXème siècle av. JC, avant qu’elle ne devienne un vrai camp militaire au Ier siècle av. JC. Est-ce cette fonction guerrière qui lui valut son nom divin, afin d’honorer la fière et sérieuse Déesse de la Guerre et de la Sagesse ? Où est-ce bien la transposition française du nom occitan Menèrbà qui ne s’apparenterait plus à la divinité romaine mais à la situation géographique de la citadelle : le celte Men veut dire pierre ou roche et d’autres dérivés de herbech font référence à la notion de refuge et d’asile. Tout dépend auprès de qui vous souhaitez revendiquer vos racines… Pour ma part, je pense que mon cœur irlandais oscille du côté des origines plus anciennes de la Gaule et se déclare celtique.

Mais la vraie part belle (et dramatique) de l’Histoire de Minerve, se joue (comme souvent par ici) au Moyen-Âge et pendant les croisades contre les Cathares, poursuivis pour leur interprétation puriste de la religion chétrienne. Vous pourrez d’ailleurs arpenter la rue des Martyrs, la seule véritablement conservée de l’époque médiévale et par laquelle les Parfaits se rendirent au bûcher qui leur était destiné en 1210.
Je vous réserve très prochainement un article plus détaillé sur la Croisade des Albigeois mais en attendant, je peux tout de même vous dire deux mots sur comment cette guerre religieuse s’est invitée dans la puissante cité médiévale…
Au milieu de la tourmente cathare, Simon de Monfort, le chef des Croisés, décide d’attaquer la citadelle imprenable où se sont réfugiés de nombreux Parfaits. Armé de catapulte (dont une seule réplique demeure aujourd’hui : la Malvoisine – « mauvaise voisine-), le chef militaire rêve de destruction. Les habitants assiégés, privés d’eau et de vivres, accablés par la chaleur, n’ont qu’une seule solution : capituler, les Cathares n’ont qu’un seul choix : abjurer ou le bûcher. 140 choisiront les flammes du dévouement et du sacrifice.

Cette cité chargée d’Histoire – dont vous pouvez découvrir plus de détails au Musée Hurepel et au Musée de paléontologie et d’archéologie – est ainsi une splendide bijoux perché dont la visite vous prendra une petite heure et qui ne finit pas de vous surprendre puisque ces ruelles romanesques ne sont pas les seuls trésors qu’elle dissimule…

L’avantage de faire halte par ici est, en effet, de pouvoir allier l’Histoire et la Nature, la Culture et l’Indomptée, car plusieurs circuits de randonnée entourent le village et promettent de magnifiques panoramas le long des gorges du Brian, suspendus aux méandres de la Cesse, dont les deux eaux mélangées racontent des contes immémoriaux.

Le Brian

Les chemins sont bien balisés, on peut commencer par « en haut« :
* monter sur la D147 à pied et après 20 mins de marche, prendre le sentier caillouteux sur la droite. Attention, après 10 autres minutes de descente cette fois-ci, quittez le chemin propret et tournez à droite sur le petit sentier forestier !
Ou par « en bas » :
* suivre les escaliers tout simplement
Le tout en vous fiant à la balise jaune. La ballade dure à peu près trois heures.

Mais si vous avez envie de sortir des sentiers battus, je vous conseille vivement de vous rendre à la Librairie Paroli (où vous pouvez aussi vous arrêter prendre un smoothie autour d’un livre après l’effort) où vous devriez demander au propriétaire de vous parler de moulins à eau, de piscine naturelle, de cascades et de routes inexplorées jusqu’à Vélieux…. ! Là, par contre, vous partez pour la journée, il faut prévoir piQUE-niQUE comme on dit par ici et maillots de bain. Le libraire se fera vraiment un plaisir de vous partager ses itinéraires secrets à condition que vous promettiez de ne pas laisser vos emballages de jambon derrière vous. Allez-y de ma part, il ne me connaît pas 😉

Pour ma part, je suis partie du parking (gratuit en ce moment d’ailleurs), suivant mon guide cathare bien-sûr et la balise jaune aussi, mais je me demande s’il ne serait pas plus aisé et saisissant de prendre l’itinéraire dans l’autre sens, en partant de la Malvoisine. Ce qui est sûr, c’est que j’ai trouvé très agréable de commencer par la forêt et de finir dans le village et que je recommande de le faire dans cet ordre.

J’ai ainsi entrepris, dans la fraîcheur déjà caniculaire du matin, cette échappée entre les canyons boisés. Et je me suis en fait évadée bien plus loin que dans les recoins cathares, je suis partie jusqu’en Amérique, je me suis envolée jusque dans le Colorado. Ces gorges verdoyantes m’ont en effet rappelé la Mesa Verde (moins la neige) dans laquelle la vie se cachait depuis plus de mille ans entre les falaises et les canyons. Ici point de troglodyte mais les gorges auraient pu être un parfait refuge. Voyez plutôt, je vous mets au défi de me dire qui est quoi :

Les cigales était de sortie dès huit heures du matin et je ne sais si c’est leur chant ou véritablement le cours du torrent qui a donné le nom d’origine de la rivière : le Bruyant, aujourd’hui raccourci en Brian, brillant en effet dans la lumière d’été. Nous étions presque seuls au monde et j’ai alors pensé qu’il n’était pas besoin de partir bien loin, moi adepte des grands espaces et des périples du bout du monde, pour s’évader dans ses imaginations.
J’étais au paradis pour quelques heures, connectée à toutes les strates de la Terre, qui se ressemblent et s’individualisent sur chaque morceau de planète, porteuses d’énergies jumelles et contraires mais toujours créatrices de rêves en couleurs, d’échappées en plusieurs dimensions.

Sous le pont de Daniel

Que vous dire de plus ?
* En été, 8h, c’est déjà trop tard pour randonner, allez-y pour 6 ou 7h…! Vous profiterez en plus de la plénitude du lieu qui tend à se remplir à partir de 11h.
* Si vous êtes dans les parages, poussez plus avant à Saint-Jean-de-Minervois pour déguster le meilleur Muscat du monde ou faites un arrêt au Château de Fauzan pour une dégustation de toutes les couleurs, le vin y est très bon m’a-t-on dit…
* Pour aller à Minerve en partant de l’Ouest, vous pouvez devez emprunter la route des crêtes, la D182, la plus belle de la région… Vous pourriez même alors, si vous avez envie de faire un détour (presque) inutile, découvrir la fameuse Curiosité de Lauriole dont je conseille à ma malicieuse collègue blogueuse du Pire Blog de voyage au monde d’en faire un article un jour si elle passe dans la région.

D’ici là, belles explorations à vous !


4 réflexions sur “Minerve

    1. Incroyable, incroyable… Faut pas trop s’emballer non plus, hein ^^ c’est beaucoup moins impressionnant dans la réalité que tout ce que mon imagination avait pu imaginer 😉 mais c’est fou de se dire qu’il y a même des panneaux pour nous conduire à ce « grand mystère » 🙂

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      1. En cette saison particulièrement calme (post)covid, je dois dire que c’était plutôt désert (un peu comme le reste de la région) mais je ne sais pas si c’est blindé en temps « normal » 😉

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