
Le Pays Cathare est une terre chargée de légendes et d’Histoire à l’origine d’une réelle fascination quand j’étais enfant. J’ai de vagues souvenirs d’être allée visiter des chateaux forts avec mon père (j’avais même reçu un diplôme de chevalier !) et ma mère a toujours nourri une passion incroyable pour les Cathares qu’elle m’a certainement indirectement transmise.
Pourtant, comme beaucoup de choses liées à mon pays, je m’en étais quelque peu éloignée ces derniers temps, allant chercher mon mystère au loin sur les terres celtiques, oubliant que la terre voisine ouvrait aussi une porte sur l’Ailleurs insondable. Comme quoi (et on se le répète en boucle pour essayer de trouver du bon à cette crise sanitaire), cette immobilité à moitié forcée, à moitié choisie, ouvre le champs des possibles.
Pour ma part, elle me réconcilie avec mes rêves de chateaux forts de petite fille que je peux maintenant regarder avec mon regard d’apprentie historienne et mon âme de sorcière illuminée.
Pour ma part, elle m’amène au-devant de cette quête fantasmée d’enfant et m’intéresse aux places légendaires entre toutes les légendes, aux lieux mystiques entre tous les mystères, aux endroits énigmatiques entre tous les secrets à travers cette rubrique sur l’Aude ésotérique et tellurique.
Ainsi, après une petite pause de saison et malgré un passage éclair aux heures somnolentes de la canicule, j’ai mieux rencontré la reine du milieu, celle plus discrète et plus conciliante qui fait le pont entre les monts et les eaux, entre les hauts et les bas, qui trace le chemin depuis Rennes Le Château jusqu’à Galamus en faisant escale par le Pic du Bugarach : RENNES LES BAINS.

C’était la semaine dernière, c’était une belle journée ensoleillée d’hiver, de celles qui nous annoncent le printemps comme une potentialité et non plus comme un inaccessible rêve. Le jour brillait d’un soleil si grand que la nuit s’apprêtait à se sublimer d’une noirceur d’encre, symbole lunaire d’un nouveau départ… Quoi de mieux alors qu’un jeudi de marche pour accompagner le mouvement des promesses à venir ? Qui de mieux alors que l’autre Rennes pour accueillir mes espoirs de renaissance en compagnie d’une amie ?
Ce petit village thermal, baigné dans les eaux prodigieuses de La Sals, se positionne en effet au point de départ de nombreuses ballades – très bien balisées – entre forêts et ruisseaux, en témoignent les cartes de randonnées semées aux quatre coins du bourg.
CARTE

Après une courte hésitation entre le parcours historique (fermé à cause des intempéries) et le parcours insolite – qui se prête en fait beaucoup plus à l’ésotérisme -, nous avons finalement opté pour ce dernier dont le point de départ se situe ici, juste en face de l’ancien centre de loisir.
Et que la promenade était belle…
Une halte obligée sur le fauteuil d’Isis pour se connecter au pouvoir minéral de la Terre. Une vue panoramique sur la vallée et les monts alentours avec quelques magnifiques clins d’œil aux pôles inversés du Pic du Bugarach sur fond de ciel bleu. Un hennissement de poulain comme une salutation au soleil. Des éclats de lumière qui scintillent sur la rivière de nos pic-nic. Les roches humides et rouillées de la Madeleine. Des traversées rocambolesques de La Sals. Tout un roman en quelques poésies éparses… l’exacte beauté simple dont nous avions besoin pour remplir nos âmes de croyances telluriques et païennes.
Mais je me perds en tellurisme quand je devrais parler d’eau, car comme à Galamus, c’est bien dans cet élément – et non dans la terre – que se situent les secrets de cette Rennes-là… Au creux des cellules aqueuses qui déplacent en 15 000 ans dans les tréfonds souterrains de la roche, pour être précise. Entre les filaments salés de La Sals qui trouve sa source sur un terrain salifère aux alentours du Pic de Bugarach et dans lesquels vient s’anoblir la Blanque à l’entrée du bourg, pour être exacte. La légende raconte même que les Bains de La Reine aurait guéri de la lèpre Blanche de Bourbon, exilée au château de Peyrepertuse par son mari Pierre Ier de Castille, dit le Cruel.
Et depuis, et même avant, la bourgade a fait ses preuves dans le thermalisme. Les fouilles archéologiques ont, en effet, prouvé le développement d’une activité thermale dés la fin du premier siècle avant J-C, peu après la conquête romaine sur les Volsques de ce que sera plus tard le Languedoc (la région, riche en gisements d’ambre, était habitée depuis la préhistoire). Mais l’Âge d’Or des Bains de Rennes a réellement lieu au XIXème siècle notamment par l’attrait de la nature cher aux Romantiques mais aussi grâce au développement des voies de communication sur tout le territoire français et à l’essor toujours renouvelé des cures en station thermale pour les personnes à la santé fragile.
Dans le courant du xxe siècle, le village de Rennes-les-Bains a fini par bénéficier de l’étrange popularité du village voisin Rennes-Le-Château qui fut la destination de mes premiers errements ésotériques. Cette notoriété a e effet rejailli sur la commune de Rennes-les-Bains sur la simple hypothèse que l’abbé Saunière aurait entretenu des relations considérées comme mystérieuses avec le curé du village thermal, alors qu’en réalité, il semblerait que les deux hommes ne se fréquentaient que très peu (l’abbé Saunière n’aurait même pas assisté aux obsèques de son ancien confrère!).

Aujourd’hui, j’en suis venue à la conclusion que les pèlerins païens, épuisés par la polarité de Bugarach, remués par les mystères de Rennes-Le-Château, trouvaient dans les Bains Doux de Rennes un tendre réconfort, la voie minérale et matricielle par laquelle toute tentative de renouveau a lieu. N’oublions pas que nous sommes constitués à 60% d’eau et que les mémoires de la planète voyagent dans ses rivières….
Et, peut-être le calme de l’hiver ensoleillé aidant, cette halte ésotérique fut ma préférée, non par son contexte (toutes, par leur compagnie, brillent dans mon cœur) mais par son environnement paisible et apaisant. La nature qui m’a manquée à Rennes-Le-Château, les foules estivales qui m’ont voilée Galamus, ont fait place nette à Rennes-les-Bains pour laisser l’espace à ma méditation d’éclore… Bien qu’à part tremper mes pieds dans la Sals pour la traverser, je n’ai pas encore goûté au pouvoir régénérateur de ses Bains.
Mais ce n’est que partie remise ! Mes maux visibles et invisibles se panseront dans les eaux des Bains Doux fumant à la porte du village à mon prochain passage, mes espoirs tangibles et intangibles se plongeront dans la Fontaine des Amours cascadant secrètement en bassins au creux de La Sals (et qui pourrait être un crochet à votre promenade insolite avant de regagner le point d’arrivée) après mon ascension de Bugarach pour l’équinoxe de Printemps.
En attendant, je vous invite à une ballade de fin d’hiver sur le circuit de votre choix. Je vous invite à vous revigorer l’âme par les pieds dans l’une de ses sources froides – la Madeleine, le Cercle, la Fontaine des Amours ou le Pontet – ; à tenter un bain chaud dans le seul bain accessible au cœur de souvenirs romains, les termes étant fermés pour cause de crise sanitaire.
En attendant, je vous invite à vous laisser emplir par la tendresse de Rennes-les-Bains.

Jolie promenade et superbes paysages.
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Merci beaucoup 🙂
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