Balade Niortaise

VOYAGEUSE INTEMPESTIVE – EP. 2

Ce qui me surprend le plus à mon arrivée à Niort, c’est d’abord le nombre de « jeunes ».

Je me permets tout de suite une première digression (oui j’ai bien dis « première », mon écriture est rocambolesque aujourd’hui) pour donner ma définition du jeune : quand je dis « jeune », je pense aux gens « comme moi », c’est-à-dire des gens plus si jeunes que ça (mais comme tout le monde, je ne me vois pas vieillir)… Enfin, ça dépend du point de vue ! Ils sont dans la moyenne : dans cette tranche d’âge de 30 à 59 ans qui fait dire à la SNCF que tu n’as le droit à aucune carte de réduction. Dans cette tranche d’âge de 30 à 59 ans qui te fait croire qu’il n’existe, hors les enfants et les morts, que trois catégories de gens :

  1. les JEUNES : les vrais ceux-là, ils ont entre 12 et 29 ans
  2. les VIEUX : oui, sachez-le, si vous avez plus de 59 ans, vous êtes vieux et vous êtes priés de ne pas trop vous attarder ! Le monde n’a visiblement pas reçu le memo : ohé les gars, on vit jusqu’à plus de 80 ans – et ceux-là, on peut dire qu’ils sont vraiment vieux ! – ; et on me dit dans l’oreillette que c’est pas l’âge de la retraite – qui n’en finit pas de reculer soit dit en passant – qui donne la définition du vieux…
  3. CEUX ENTRE LES DEUX, les adultes (?!) : première nouvelle, il ne se passe rien entre tes 30 et tes 59 ans et les 20 ans que tu te prends entre les deux n’ont aucune importance ! De quoi ravir ceux qui ont peur de vieillir !

[Fin de la première digression]

Ce qui me surprend donc le plus à mon arrivée à Niort, c’est de constater que la ville n’est pas remplie de vieux (les vrais !) grabataires, mais plutôt de « jeunes » bobos de 30 à 59 ans.

Et cette idée reçue, je la tiens certes à ma mémoire : depuis mes plus jeunes années, Niort est sur le chemin pour rendre visite à mes grands-parents qui, quand j’avais 4 ans en avaient 60. Donc, dans la définition de la SNCF – et, je dois le reconnaître, dans la mienne à l’époque – ils appartenaient à la catégorie des VIEUX (pour ma défense, ils étaient grands-parents, on peut dire qu’ils avaient quand même un signe distinctif de vieillesse !). Il ne m’en a pas fallu plus pour associer l’Ouest de la France dans son ensemble à un refuge de vieux (ça se voit que je ne suis jamais allée sur la Côte d’Azur en plein hiver mais passons !) et à un environnement gris (ça, on dira que c’est aussi un peu la faute à l’architecture et j’y reviendrai).

[Fin de la deuxième digression]

Cette idée reçue donc – Niort serait une ville de vieux ! -, je la tiens certes à ma mémoire, mais je la tiens aussi de Coulon (merci les tee-shirts « 100% retraité 100% débordé ») et le marketing touristique en général qui consiste à cibler les retraités qui ont de l’argent plutôt que les cyclo-touristes un peu fauchés. Ya qu’à voir le coût de l’hébergement sur place (ça, il paraît que c’est la faute aux assurances !) : on trouve rien pour moins de 70€ la nuit.

Alors que franchement, permettez-moi une troisième petite digression – pour faire valoir pendant trois lignes mon récent diplôme touristique ! -, Niort serait une destination idéale de Slow Tourisme pour attirer les « jeunes » écolos comme moi : aux portes du Marais Poitevin, espace protégé, c’est sur la vélo Francette qui relie Ouistreham dans le Calvados à La Rochelle dans la Charente Maritime sur plus de 600 km. Le problème, c’est qu’il n’y a que peu d’infrastructures pensées et mises en place dans les Deux-Sèvres, notamment en termes d’hébergement, pour en faire le genre de destination eco-responsable abordable vers laquelle les voyageurs et voyageuses comme moi ont les moyens d’aller (parce que c’est pas forcément l’envie qui manque).

[Fin de la troisième digression]

Ce qui me surprend donc le plus à mon arrivée à Niort, c’est d’abord de découvrir qu’il s’agit du genre de villes moyennes où tous les trentenaires-quarantenaires, jeunes mariés ou jeunes parents, se plaisent à s’établir pour construire une vie tranquille loin de la pollution et de la cohue des grandes villes. Je suis si séduite de ce constat que j’ai presque envie de m’y installer alors que je suis programmée pour ne pas vouloir vivre au-dessus de Bordeaux (mon seul bémol : je suis une célibataire qui espère que ce n’est pas un état irrémédiable alors, sauf si je veux briser un jeune ménage, il faut d’abord que je trouve chaussure à mon pied, bague à mon doigt, enfant dans l’tiroir, avant de m’installer à Niort).

Ce qui me surprend le plus à mon arrivée à Niort, c’est ensuite qu’il fait chaud et beau (et je pense que ça me choque encore plus que le coup des « jeunes »…) ! Quand j’ai regardé la météo avant de partir, j’en ai pas cru mon téléphone, j’ai donc pris mon ciré… au cas où (autant vous dire que, comme vous l’aurez constater au cours de mon Escapade en Verte Venise, j’aurais mieux fait de prendre ma crème solaire !). C’est comme ça, que voulez-vous, je suis aussi programmée pour avoir froid au-dessus de Bordeaux (et avoir des idées reçues sur Bordeaux en passant !).

Le Soleil d’Avril joue donc avec l’architecture grise dont je me souvenais à tort ou à raison : les maisons sont plus banches que grises et le bras de rivière qui la traverse est plus fleurie que brun. Bien-sûr les ponts sont gris, mais un peu comme dans beaucoup de villes finalement…. C’est peut-être à cause des toits en ardoise que je me suis racontée cette histoire… En tous cas, le Soleil d’Avril transforme mes souvenirs, joue avec le vert de gris et fait bon vivre…

Ainsi, quand j’arrive à Niort, c’est avec plaisir que je me laisse joyeusement déconstruire par toutes les pensées préétablies que j’avais sur la ville afin de pleinement profiter de ma balade niortaise. Je sens que ça palpite en dedans, que ça pétille dans l’air… Je me laisse couler le long de la Sèvre Niortaise, pour découvrir la ville des gens pas si jeunes mais pas si vieux non plus, en adoptant naturellement le rythme des autochtones.

Après une correspondance éclair la veille, je rencontre véritablement Niort au coucher du soleil samedi soir. La douceur de la nuit et de la ville me chaperonne jusques aux lumières de Magic FlonFlon en bords de Sèvre. Rien que le nom me met le cœur en fête. C’est le lieu branché mais sans prétention de Niort. Situé sur le Port Boinot en pleine réhabilitation après avoir abrité l’usine de chamoiserie (en français : on y fabriquait des ceintures [de pantalon ! pas de sécurité]), le bar a élu domicile dans les anciens hangars sur une petite île embrassée par la Sèvre pour servir « Food, Drink & Magic ». Ma bière à la main, j’y écris, lis et écoute le bruit des gens dans un frais carré d’herbe sous le premier quartier de lune.

Le dimanche matin, je navigue dans les allées de la Halle du marché qui fait la fierté de la ville. Surveillée par Mercure, le Dieu du Commerce, et Cérès, la déesse de l’agriculture, elle aspire à être élue « Plus beau marché de France ». Puis, je m’installe sur l’esplanade, à cheval sur la balustrade en pierre comme d’autres esseulés, un verre de vin blanc à la main et le regard perdu dans la foule multicolore de ce rendez-vous dominical.

Puis, je rejoins ma nouvelle rencontre de voyage, Julie, dont je ne manquerai pas de vous dresser le portrait dans mon prochain article, pour un nouveau verre de vin blanc au Magic FlonFlon qui continue à distiller sa magie.

Puis, je m’éloigne de la ville sans vraiment la quitter, trouvant refuge dans la fraicheur boisée des îles de la Sèvre. Je me rapproche du Marais sans le rejoindre en compagnie d’un couple de canards qui m’a apprivoisée. Je fais la traditionnelle halte d’écriture, plus courte, moins fébrile que la veille, la langueur du dimanche finit par déteindre…

Puis, je me nourris de l’histoire de la région entre les murs blancs de l’Office de Tourisme. Là, j’y fais la rencontre d’Epona, la déesse des chevaux et la protectrice des voyageurs, devenue l’égérie de Niort après qu’on en trouve des extraits de statues à la réhabilitation du Port Boinot. Il ne m’en faut pas plus pour enflammer mes idées vers l’écriture d’un seul en scène de théâtre. Tout est toujours prétexte à créer !

J’erre finalement au fil des rues en accéléré par peur de louper mon train en retard… Questionnant mes inspirations d’écriture : vais-je être capable de planter le bon décor pour mon roman ? Interrogeant mon soudain coup de foudre : aurais-je autant aimé la ville sous la pluie ?

Puis, je rentre chez moi, le cœur léger, les bras brûlés, les idées phosphorées, l’esprit allégé, avec une seule injonction : Jeunes, Vieux, Entre les deux, allez donc vous balader à Niort par un week-end printanier ! Laissez vous surprendre par la magie du flonflon, par la fraîcheur du gardon et par la verdure du lagon ! Ca pourrait vraiment vous plaire, même si vous n’êtes pas vieux et retraités, n’en déplaise aux tee-shirts et au marketing touristique !

En tout cas moi, je suis conquise !

Justine T.Annezo – 14-15 avril 2024, Niort – GMT+2


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